Un personnel soignant qualifié permet d'éviter des centaines de décès et pourrait faire économiser des milliards de francs au système de santé

Plus la proportion de personnel infirmier est élevée, plus le risque de mortalité des patients est faible et plus ils peuvent quitter l'hôpital rapidement. Une économie de 357 millions de francs par an serait ainsi réalisée rien que pour les hôpitaux de soins aigus. Une analyse de données collectées par l'Office fédéral de la statistique suisse le confirme.

De nombreuses études internationales ont déjà prouvé qu'une proportion plus élevée d'infirmières dans l'équipe soignante permet de réduire les complications et le risque de décès des patients hospitalisés. L'analyse de données collectées par l'Office fédéral de la statistique (OFS) démontre que ces résultats sont également valables pour la Suisse. "Nous l'avons noir sur blanc: les investissements dans le personnel infirmier permettent d'économiser des millions de francs et de sauver des centaines de vies", déclare Sophie Ley, présidente de l'Association suisse des infirmières (ASI), commanditaire de l'étude.

Hôpitaux de soins aigus: 357 millions de francs d'économies potentielles, 243 décès évités
Les données de l'OFS, venant de 135 hôpitaux et de plus de 1,2 million de patients, ont été analysées par une équipe sous la direction du professeur Michael Simon (Universités de Bâle et de Berne), expert en sciences infirmières, et du professeur Michael Gerfin (Université de Berne), économiste. Cette étude avait pour objectif d'analyser l'influence des heures de soins fournies et de la composition de l'équipe soignante sur les événements indésirables et la durée d'hospitalisation. 
Les résultats obtenus montrent que moins il y a d'heures de soins qualifiés  par jour plus le risque d'événements indésirables augmente. De plus, le risque de décès augmente de deux pourcents si moins de 9,5 heures de soins qualifiés sont disponibles par jour et que la proportion de personnel infirmier est inférieure à 75 pourcents. Cela correspond à 243 décès par an. Le lien est encore plus évident pour d'autres événements indésirables, par exemple les troubles du métabolisme.
Les données montrent également qu'une proportion moins élevée d'infirmières et infirmiers génère des hospitalisations plus longues: moins de 10 heures de soins qualifiés par jour et moins de 88 pourcents de personnel infirmier dans l'équipe soignante entraînent 223'020 jours de soins supplémentaires par an, soit 357 millions de francs suisses chaque année.

Etablissement médico-sociaux (EMS): les hospitalisations évitables coûtent 100 millions de francs
L'étude InterCare de l'Université de Bâle montre que 42 pourcents des hospitalisations de résidents d'établissements médico-sociaux (EMS) pourraient être évités. Il en résulte des coûts supplémentaires inutiles de quelque 100 millions de francs par an. Des hospitalisations évitables se produisent, par exemple, en raison de l'aggravation d'une maladie chronique. De telles situations pourraient être évités s'il y avait suffisamment de personnel soignant qualifié dans les EMS, capables d'intervenir suffisamment tôt et de mettre en place les mesures nécessaires. InterCare recommande par exemple le déploiement d'infirmières de pratique avancée.

Soins ambulatoires de longue durée: un potentiel d'économie d'au moins 1,5 milliard
Seuls quelque 4,6 pourcents des personnes de plus de 65 ans qui sont hospitalisées viennent d'un EMS. Le volume des hospitalisations évitables dans le secteur ambulatoire est donc beaucoup plus élevé. Le potentiel d'économie s'élève au moins à 1,5 milliard de francs.

Conclusion: il est rentable d'investir dans le personnel infirmier
Les chiffres disponibles aujourd'hui montrent de manière univoque que cela vaut la peine d'investir financièrement dans le personnel infirmier. "Le calcul est simple: dans les hôpitaux, on augmente à 80 pourcents la proportion d'infirmières dans les équipes de soins. La masse salariale augmentera peut-être de quelques millions, mais 357 millions de francs pourront être économisés", explique Sophie Ley. Les coûts économisés seraient encore plus élevés dans les soins de longue durée. Et il ne s'agit que de l'aspect financier, car les souffrances inutiles évitées de cette façon ne sont pas du tout quantifiables. "Ces chiffres doivent être intégrés dans les discussions politiques lors des débats sur les mesures à prendre pour maîtriser les coûts de la santé, sur la sécurité des patients et sur l'initiative sur les soins infirmiers", conclut-elle. 

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