La nécessité d'agir dans les soins infirmiers ne concerne pas (seulement) les salaires

Lukas Engelberger, président de la Conférence des directrices et directeurs cantonaux de la santé, met en garde aujourd'hui dans les médias de Tamedia contre les «illusions» concernant des augmentations générales de salaires pour le personnel soignant. Pour l’ASI, les salaires ne sont qu'un élément pour éviter la pénurie imminente de personnel infirmier: Il est urgent d'investir dans la formation et en faveur de conditions de travail attrayantes.

La pandémie de Covid-19 l’a amèrement démontré: pour surmonter une telle crise sanitaire, il faut non seulement suffisamment d’équipement mais surtout un personnel infirmier formé en conséquence; dans le cas du coronavirus, il s’agit d’expertes et d’experts des soins intensifs. Pour que ce personnel soit disponible, il faut suffisamment de personnel infirmier à tous les niveaux ainsi que des incitations pour qu'il suive les cours de formation et de formation continue correspondants aux exigences requises. Aucune de ces conditions n'est remplie aujourd'hui.

«C'est la raison pour laquelle nous avons lancé l'initiative sur les soins infirmiers», explique Sophie Ley, présidente de l’ASI. «Elle garantit l’approvisionnement en soins de la population. Or, cela ne peut pas être obtenu uniquement par des augmentations de salaires. Les mesures visant à accroître le nombre de personnes formées sont essentielles, mais il faut surtout investir dans les conditions de travail. Aujourd'hui, près de la moitié du personnel infirmier formé quitte la profession, frustrée, après peu de temps.» Les possibilités de carrière décrites par M. Engelberger ne sont pas suffisantes pour garder le personnel dans la profession. «La satisfaction au travail dépend également de la capacité des soignants à mettre pleinement à profit leurs aptitudes et leurs compétences, et à ne pas être freinés par des contraintes économiques et une bureaucratie dépourvue de sens», déclare Sophie Ley.

Les soins infirmiers ne sont pas responsables de l'augmentation des coûts de la santé, bien au contraire:un personnel infirmier qualifié permet d'éviter des centaines de décès et pourrait permettre d'économiser des milliards en frais de santé, comme le montre, entre autres, une étude dirigée par le professeur Michael Simon, publiée par l’ASI en début d'année. Les investissements dans le personnel soignant sont rentables: pour environ deux millions de francs de masse salariale en plus, 357 millions de francs pourraient être économisés dans les seuls hôpitaux de soins aigus grâce à une proportion plus élevée d’infirmières et d’infirmiers. Dans les soins de longue durée, le potentiel d'économie s’élève même à 1,5 milliard de francs par an.

«Nous appelons les responsables politiques au niveau fédéral et cantonal à reconnaître enfin les faits, à prendre les études scientifiques au sérieux et à prendre des décisions de politique de santé sur cette base. Les soins infirmiers ne constituent pas un facteur de coût, mais une solution pour résoudre les innombrables défis à venir dans le domaine de la santé. Les politiciens feraient bien de prendre enfin des mesures réellement efficaces pour garantir qu'un nombre suffisant de personnel infirmier soit formé et qu'il reste dans la profession. Des salaires décents sont un moyen efficace pour y parvenir, mais ce n'est pas le seul», explique Sophie Ley.

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